Un voyage dans le temps : avec ou « cent » majuscules?
Il existe trois expressions à caractère historique où le mot « cent » s’écrit avec une majuscule : la guerre de Cent Ans, les Cent-Jours et le Conseil des Cinq-Cents. Oui, mais encore…
La guerre de Cent ans est un conflit entrecoupé de trêves qui a opposé de 1337 à 1453 ( soit 116 ans) la France à l’Angleterre, et plus précisément la dynastie des Valois et celle des Plantagenêts dont le nom viendrait d’un ancêtre portant sur son chapeau une branche de genêt jaune. D’une part, Édouard III d’Angleterre, petit-fils de Philippe IV le Bel, revendique le trône de France. D’autre part, le roi d’Angleterre désire s’attacher les riches cités flamandes liées au commerce anglais des laines.
Ainsi, les Français sont battus à Crécy en 1346 et perdent Calais en 1347. Après le triomphe d’Édouard III, dit le Prince noir, près de Poitiers en 1356, la France se voit obligée de signer le traité de Brétigny en 1360. Le quart sud-ouest de la France devient anglais. En 1380, grâce à Charles V et Du Guesclin, la France récupère ses terres perdues à l’exception de Calais et de la Guyenne, province du sud-ouest. Sous Charles VI, la guerre civile entre Armagnacs (famille d’Orléans) et Bourguignons (ducs de Bourgogne) fait rage. Le roi d’Angleterre Henri V en profite et signe en 1420 le traité de Troyes qui consacre la déchéance du roi de France et la régence du roi d’Angleterre. En 1429, Jeanne d’Arc délivre Orléans, ranime le patriotisme français et fait sacrer Charles VII à Reims. Les Anglais sont battus à Formigny en 1450, puis à Castillon en 1453, et chassés du royaume sauf de Calais.
Comme son nom ne l’ indique pas et malheureusement pour tous les élèves de France et d’Angleterre, la guerre n’aura pas duré 100 ans mais 116 ans. Pas cool ! De plus, les combattants des seize dernières années comptent pour du beurre. Trop pas cool !
Les Cent-Jours retracent la période de l’histoire de France entre le retour de l’empereur Napoléon Ier le 20 mars 1815 et son abdication le 22 juin 1815. Parti de l’île d’Elbe (île italienne de la Méditerranée, à l’est de la Corse) où il était exilé depuis sa première abdication en avril 1814, Napoléon traversa la France et entra à Paris le 20 mars. Cette route de Napoléon est connue sous le nom « le vol de l’aigle » à la suite de ses paroles : « L’Aigle volera de clocher en clocher jusqu’aux tours de Notre-Dame. »
Pour éviter de rencontrer les royalistes de Provence, Napoléon décide de couper par les Alpes. Son fidèle ami, le général Cambronne, célèbre pour son juron, le précède de quelques heures et annonce son arrivée dans les villes et villages sur son chemin. Naît alors un grand élan de ferveur populaire pour le retour de l’Empereur. À Grenoble, s’avançant seul vers l’ennemi, Napoléon s’écrie : « Soldats du 5è, me voilà. Je suis votre Empereur. Me reconnaissez-vous ? S’il en est parmi vous qui veuille tuer son Empereur, me voici ! » Tout peut encore basculer… Puis, des cris de joie fusent : « Vive Napoléon ! Vive notre Empereur ! » Mais rien n’est encore gagné. En effet, les troupes du maréchal Ney sont à l’horizon; celui-là même a juré à son roi Louis XVIII de lui ramener Bonaparte dans une cage de fer. Sur sa route, il découvre une France bonapartiste et s’incline : « Que voulez-vous ? Je ne puis arrêter l’eau de la mer avec mes mains. » Il rallie donc la cause de Napoléon.
L’Empereur revigoré instaure le régime constitutionnel le 21 mars 1815 après la désertion de Louis XVIII. Laissant peu de répit au Petit Caporal, les puissances européennes relancent la guerre contre Napoléon, considéré comme un usurpateur. Il rassemble une nouvelle armée dite « Armée du Nord » et remporte la bataille de Ligny le 16 juin. À la fin de cette bataille, le maréchal Blücher, chef de l’armée prussienne, échappe miraculeusement aux Français. Son cheval tué s’écroule sur lui l’immobilisant et le faisant passer pour mort. Il parviendra à se dégager grâce à son aide de camp. Les jours se suivent et ne se ressemblent pas : le 18 juin 1815, Napoléon est vaincu à Waterloo, au sud de Bruxelles, par l’armée des alliés (britanniques, allemands, belges et hollandais) dirigée par le duc de Wellington et celle des Prussiens commandée par le fameux Blücher. Quatre jours plus tard, ce 22 juin 1815, l’Aigle abdique pour la seconde fois.
Cette cuisante défaite de la bataille de Waterloo inspirera Victor Hugo (1802-1885) dans son poème satirique « L’expiation » extrait des Châtiments : Il neigeait. On était vaincu par sa conquête. Pour la première fois l’aigle baissait la tête. Sombres jours ! L’empereur revenait lentement … Waterloo ! Waterloo ! Waterloo ! morne plaine ! Tu désertais, victoire, et le sort était las. O Waterloo ! je pleure et je m’arrête, hélas ! De cette bataille est née l’expression populaire : « connaître son Waterloo ».
Le conseil des Cinq-Cents est l’assemblée (ou chambre basse) qui, sous le Directoire (1795-1799), constituait , avec le Conseil des Anciens (ou chambre haute), le corps législatif.
Composé de cinq cents députés élus au suffrage censitaire (grands électeurs), ce conseil élaborait les lois, ensuite soumises à l’approbation du Conseil des Anciens.
Le conseil était en quelque sorte l’imagination de la République, alors que les Anciens en étaient la raison.
Les Cinq-Cents revêtent une robe longue et blanche, une ceinture bleue, un manteau écarlate et une toque de velours bleue.
Et le mot « histoire » me direz-vous? Prend-il une majuscule ?
Il est vrai qu’il existe un usage toléré mais non obligatoire, voire fautif (Robert de difficultés du français), à écrire ce mot avec un H majuscule dans certains cas.
Lorsque l’on évoque l’Histoire de France ou celle de l’humanité, la majuscule lui donne une certaine grandeur. De même, l’Histoire personnifiée justifie cet emploi du H : « L’Histoire nous le dira. »
Pour tous les autres sens de ce mot, la minuscule est de rigueur : un professeur d’histoire, une belle histoire, c’est de l’histoire ancienne !
À noter enfin, que l’expression « sans histoire » s’écrit au singulier : des vies sans histoire.